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Objets connectés : prenons garde au précipice !


Rédigé par Stéphane ZIBI, Valtech France le 10 Février 2014

L’an dernier, le Consumer Electronics Show de Las Vegas avait été marqué par les montres et télévisions intelligentes. L’édition 2014 a consacré les objets connectés. Vieille lubie des technophiles, ils sont en passe de profondément transformer notre quotidien dans les années à venir. Force est de constater que leur périmètre s’est accru avec de nouveaux produits et toujours plus de fonctionnalités.



Stéphane Zibi, Directeur du développement et de l’innovation chez Valtech France
Stéphane Zibi, Directeur du développement et de l’innovation chez Valtech France
Sont concernés la maison, la santé, la voiture, le sport, le fitness, la cuisine… La tendance est telle que parler de l’Internet of Things (l’Internet des Objets) paraît déjà désuet ; ce phénomène est qualifié d’Internet of Everything (le « Tout-Internet ») tant il ne semble plus y avoir de limite. Tout est potentiellement connectable, tout devient connecté. La course – entre les start-ups, les géants du Web et les grandes marques – est définitivement lancée. Gartner table d’ailleurs sur plus de 26 milliards d’objets connectés à horizon 2020.

Cette frénésie semble se justifier aux vues des attentes du marché. Ainsi, 81% des Français ont déjà entendu parler des objets connectés (enquête CSA pour Havas Media, novembre 2013). Les objets les plus attrayants sont les voitures (mentionnées à 61%), les montres (49%), les réfrigérateurs (48%), les lunettes et pèse-personnes (38 %), les stylos (36 %), les bracelets (35 %), les vêtements (32 %), les chaussures (28 %), les brosses à dents (25 %) et les fourchettes (19%). Les consommateurs sont donc plus que prêts à les expérimenter.

Néanmoins, devant la multiplication des produits, il est légitime de se demander si nous ne sommes pas au seuil de « l’explosion de la bulle ». Empiriquement, les innovations technologiques suivent souvent le même modèle d’adoption et de maturation. Il y a d’abord une phase de bouillonnement et d’attentes très (trop) importantes. Viennent ensuite les premières désillusions, les critiques et les faillites. C’est la chute libre. Finalement, après une drastique rationalisation de la technologie, c’est petit à petit que va démarrer son adoption définitive. Ainsi, le QR code et la réalité augmentée sont entrés dans cette phase de désenchantement, après avoir été à la mode. Or, beaucoup d’objets connectés semblent être des gadgets qui, une fois passée l’excitation des premières utilisations, risquent de tomber dans l’indifférence et l’oubli. Le désir est d’autant plus important qu’entre la commande sur une plateforme de crowdfunding et la réception de l’objet, il s’écoule plusieurs semaines/mois. Nous sommes au sommet de cette courbe d’attentes inflationnistes, prêts à franchir le précipice.

Comment éviter, du moins partiellement, ce réveil difficile ? Comme souvent, c’est la personne et/ou l’entreprise qui aura réussi à correctement « marketer » l’objet qui sera récompensée par les consommateurs. Et les enjeux sont de taille.

Hélas encore parfois négligée, l’expérience-utilisateur devra être optimale et la plus personnalisée possible : usages et fonctionnalités pertinents, interfaces agréables et fonctionnelles, design de qualité… C’est une condition sine qua none ! Libérer de certaines tâches rébarbatives, fluidifier les transactions et les échanges, instaurer une conversation permanente entre un consommateur et une marque ou encore permettre le self-improvement de l’utilisateur, la valeur ajoutée des objets connectés peut être multiple.

Attention aussi au « syndrome Rafale » ! La surenchère technologique peut s’avérer fatale à la longue : trop compliquée, trop coûteuse, elle rebute les utilisateurs. Le mieux est l’ennemi du bien. Par le passé, les devices les plus vendus (comme l’iPhone et l’iPad) « n’étaient » au final qu’un condensé des meilleures technologies disponibles. Aux fabricants de proposer une sélection adéquate et ce, sans oublier la compatibilité des appareils, des formats, des standards… D’ailleurs, il faut prévenir le risque de « cacophonie » : quel écosystème digital entre une montre, une bague, des lunettes, voire des lentilles, un bracelet, un smartphone, une tablette, et la ribambelle d’autres objets connectés qui va avec ? Il faudra définir des frontières précises entre tous ces devices pour éviter redondance et surabondance de l’information, à l’heure où beaucoup d’utilisateurs cherchent de temps à autre la déconnexion.

Enfin, trouver un juste équilibre dans le partage des données est nécessaire. Si jusqu’ici la majorité d’utilisateurs avait plutôt fermé les yeux, l’actualité est sans cesse là pour nous rappeler qu’il y a un pendant négatif – mais par nature indispensable – aux objets connectés : la collecte des données personnelles. Que ce soit Google, Facebook, Prism, les agissements de la NSA ou récemment le premier piratage à grande échelle d’objets connectés, de trop nombreux événements braquent les consommateurs. Afin d’éloigner le fantasme de « 1984 », seule une gestion responsable des données personnelles par les entreprises fera tomber le mur de la méfiance.

C’est à ce prix que les objets connectés trouveront leurs publics et perdureront, instaurant un « gagnant-gagnant » entre les utilisateurs et les marques.




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