Une intelligence artificielle pourra-t-elle avoir une conscience ?


Rédigé par le 11 Janvier 2025



Michel Bruley
De la conscience

La conscience c’est la connaissance, intuitive ou réflexive, immédiate, que chacun a de son existence et de celle du monde extérieur. Elle recouvre différentes capacités : capacité à connaître son environnement (connaissance, questionnement sur le monde, l’existence humaine, philosophie) ; capacité à ressentir (conscience phénoménale, vécu, ressenti, perception, sentiments) ; capacité à se connaître (psychologie, connaissance des faits psychiques, comportements, processus mentaux) ; capacité à évaluer et choisir (la morale, évaluations de ses actions, de celles des autres en fonction de principes, du bien, du mal).

Cependant, il faut comprendre que malgré toutes nos capacités, nous avons des perceptions qui ne correspondent pas parfaitement au monde extérieur, à la réalité, nous percevons que ce qui nous est nécessaire pour être fonctionnel, les animaux ont souvent des perceptions différentes des nôtres, souvent liées à des capacités différentes (vision, odorat … radar, sonar …) et tout cela est géré par le cerveau qui est un filtre, une interface entre nous et la réalité. Nous sommes notre cerveau et la conscience est une capacité computationnelle qui s’exprime à travers le cerveau, le cœur, le corps … Le cerveau (chez l’homme ~1 350 cm³ - 1,2 à 1,4 kg de matière molle) est intimement lié à un être vivant dont il consomme par exemple chez l’homme 20% de l’énergie et 40% de l’oxygène.

Enfin il faut aussi noter qu’il y a de nombreux débats concernant la conscience :
• Les essentialistes et les existentialistes, s’opposent sur le fait de savoir qui de l’existence ou de l’essence précède et concrètement pour l’homme, de savoir s’il est libre de se définir ou si tout est écrit d’avance, ou si ... ou si …
• Les matérialistes et les idéalistes analytiques n’ont pas la même vision de la conscience, pour les premiers, la matière existe avant et indépendamment de la conscience (la matière précède la conscience) alors que pour les seconds, la conscience est la base de la réalité, la matière est un modèle explicatif, la physique est une science de la perception (la conscience précède la matière).
• Enfin, lorsque l’on meurt, notre conscience disparaît, mais pour ceux qui croient que l’homme a une âme l’histoire d’une personne ne s’arrête pas à sa mort. (Voir mon article : animés ou inanimés, avez-vous donc une âme ?).

De l’intelligence artificielle

Si l’intelligence artificielle est définie en termes d’intelligence humaine, alors elle devrait être capable de : percevoir, raisonner et déduire, communiquer, se rappeler, résoudre des problèmes, apprendre et s'adapter, avoir du bon sens, appliquer l'analogie, être ingénieuse, être créative, avoir de la curiosité, avoir de l'intuition, avoir des émotions, atteindre la conscience de soi …

Le domaine de l’IA est celui de la conception, l'étude, la construction de programmes informatiques et de machines qui se comportent intelligemment, qui sont intelligents, mais à l’heure actuelle, il n’est pas sûr qu’il soit possible de construire un jour un programme, une machine possédant tous les aspects de l’intelligence humaine énumérés au paragraphe précédent.

Il faut aussi prendre en compte que différents types et degrés d’intelligence existent chez les humains, chez les animaux et qu’il en est de même pour les programmes ou les machines. On construit déjà des programmes et des machines qui résolvent des problèmes qui nécessitent des connaissances, qui automatisent des activités que nous associons à la pensée humaine (par exemple : apprentissage … prise de décision …).

À noter cependant qu’il peut y avoir automatisation sans compréhension de la part du programme ou de la machine, un ordinateur ne comprend pas l’addition, il sait juste qu'un certain code opérationnel (+) signifie déplacer les valeurs vers l'additionneur et déplacer le résultat ailleurs (=). C’est ainsi que l’informatique conventionnelle fonctionne, le programmeur a indiqué au système exactement comment résoudre un problème, et si ce programme ne peut résoudre que ce seul problème, il garantit une solution, les résultats sont cohérents et fiables, ce n’est pas toujours le cas avec l’intelligence humaine.

Des différents types d’intelligence artificielle

Aujourd’hui, le plus souvent, on distingue trois sortes d’IA :
• L’ANI (IA étroite ou faible) qui excelle dans des tâches spécifiques sans capacité d’apprendre au-delà de ce à quoi elle est destinée ; elle exécute des tâches suivant des instructions. C’est un nouveau type d’outil qui renforce les capacités humaines (reconnaissance vocale, d’image … traduction, traitement du langage … outils personnels divers …). Elle nécessite des ensembles de données d’entraînement, un processus d’apprentissage (automatique, via un traitement du langage naturel … des réseaux neuronaux). L’exemple de ce type dont on parle le plus actuellement, c’est l’IA générative (texte, image, son, vidéos). L’IA outil peut faire gagner quelques heures par employé équipé et par semaine.
• L’AGI (IA générale ou forte) qui reflète la cognition humaine et peut faire beaucoup de choses différentes. Elle pousse l’apprentissage plus loin et elle peut effectuer une tâche comme un humain, elle réussit le test de Turing. Elle élargit les possibilités de l’ANI, elle est capable de comprendre un code écrit par des humains, de l’améliorer, de l’optimiser ; elle est réactive, par exemple, elle comprend le langage dans un contexte donné et pas seulement en se basant sur les mots ; … C’est un agent intelligent qui assiste son propriétaire, cependant on notera qu’elle n’est pas capable d’exister de façon indépendante. L’IA agent peut remplacer un ou plusieurs employés par service utilisateur.
• L’ASI (super IA) qui est plus intelligente que l’esprit humain et peut effectuer n’importe quelle tâche mieux que lui. Elle atteindrait la conscience de soi grâce à un apprentissage indépendant. C’est objectivement une promesse futuriste qui est le plus souvent considérée comme de la science-fiction. C’est aussi potentiellement un alien dangereux pour l’homme par exemple dans le domaine militaire d’éventuels systèmes létaux autonomes.

Par analogie avec les drones, on imagine bien qu’il peut y avoir des intelligences artificielles contrôlée, manipulée par une personne ; supervisée, elle a certains degrés d’autofonctionnement supervisé par un opérateur humain ; automatique elle fonctionne de façon indépendante dans un cadre prédéfini ; autonome, elle est automatisée et peut s’adapter à des circonstances changeantes ; … !?

En conclusion

Le propre de l’homme est d’être conscient et plein d’émotions, son intelligence est indissociable de cette dualité. Les émotions sont des réactions que la science nous dit provenir de notre cerveau. Notre cerveau qui a différentes parties qui jouent un rôle dans la production de nos émotions : le cerveau reptilien qui est le centre de nos instincts primitifs et essentiels (boire, manger …), le cortex cérébral qui permet de parler, imaginer planifier, créer … et le cerveau limbique qui mémorise nos ressentis et en collaboration avec les autres parties, génère des réponses émotionnelles et des intuitions qui influencent notre comportement. Pour les futures super intelligences artificielles, la route va être longue.

Enfin, on notera le paradoxe que par rapport à l’informatique traditionnelle, l’intelligence artificielle ne garantit pas une solution à un problème donné. Les résultats peuvent ne pas être fiables et cohérents, comme on peut parfois le constater avec les incongruités actuelles des IA génératives. L’intelligence artificielle cherche à copier l’intelligence humaine et si elle y arrive, comme celle-ci, elle commettra des erreurs et dira, fera des conneries. La connerie humaine est un sujet inépuisable :
• « Certains ne sont jamais seuls, ils sont toujours accompagnés de leur connerie » Arletty
• « Le bon sens est la chose la mieux partagée au monde … la connerie aussi » Jacques Rouxel
• « La connerie, c’est la décontraction de l’intelligence » Serge Gainsbourg
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• « L’expérience, c’est une connerie par jour, mais jamais la même »
• « Ce qui empêche les gens de vivre ensemble, ce ne sont pas leurs différences, mais leur connerie »
• …



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