Peoplesoft dit 'oui' à Oracle moyennant un milliard de dollars de plus


Rédigé par le 13 Décembre 2004

Ce serait finalement ce week-end dernier que les discussions entre les conseils d’administration de Peoplesoft et de Oracle auraient porté leurs fruits. Oracle obtient l’aval de Peoplesoft et débourse un peu plus de 10 milliards de dollars pour se poser en véritable numéro 2 mondial incontesté des applications de gestion d’entreprise.



Larry Ellison a finalement retrouvé un peu moins d’un milliard de dollars au fond de sa poche pour « remettre au pôt », et offrir une sortie honorable à l’ensemble des parties. L’honneur est une valeur importante dans l’univers de culture japonaise que le PDG fondateur de Oracle apprécie tout particulièrement.
Après dix-huit mois d’un feuilleton comme on en avait rarement vu dans le secteur informatique, le conseil d’administration de Peoplesoft a finalement accepté de suivre la majorité de ses actionnaires, et cédé à la pression de Oracle. Le conseil, présidé par Dave Duffield, fondateur de l’entreprise revenu aux commandes il y a quelques semaines, n’avait pas beaucoup d’autres choix que d’accepter de se mettre à la table des négociations. Dans le cas contraire, les batailles juridiques et les hésitations des clients auraient pu faire perdre gros aux actionnaires de Peoplesoft. En apportant à plus de 60% leurs titres à l’offre de Oracle, les actionnaires de Peoplesoft avaient déjà en quelque sorte signifié leur désaccord avec l’attitude strict de leur conseil d’administration.
Mais le conseil de Peoplesoft parvient néanmoins à sauver la face. Il réclamait un prix plus élevé que les 24 dollars l’action proposés dans la dernière offre de Oracle. Il obtient 26,5 dollars l’action, ce qui correspond à une valorisation globale de Peoplesoft autour de 10,3 milliards de dollars. Un peu moins d’un milliard de dollars, c’était donc le prix à payer par Oracle pour faire basculer l’attitude de rejet du conseil de Peoplesoft en une acceptation timide mais complète. Un bon calcul pour les deux parties, sans doute. Le manque à gagner en contrats suspendus pour Peoplesoft, les frais de justice et d’avocat pour les deux parties, et l’image dégradée des deux sociétés auraient peut-être coûté encore plus cher aux protagonistes.

Concilier les discours d’hier et de demain

Mais alors que pour la plupart des médias cet épisode clôture une folle année de tractations et de communiqués guerriers, le travail commence pour d’autres ! En effet, intégrer Oracle et Peoplesoft, deux entreprises de plusieurs milliers de personnes qui ont appris à se détester depuis dix huit mois, ne sera pas chose facile. Depuis le lancement de l’OPA, les salariés de Peoplesoft ont véhiculé un message de victimes, faisant de leur « agresseur » le méchant de l’affaire. Demain, ils vont devoir travailler ensemble… ou partir. Chez Oracle on devra apprendre également à les respecter, et à ne pas les considérer comme de simples perdants. C’est dans ce jeu délicat de politique et de ressources humaines que se jouera la réussite de cette fusion. Du côté des dirigeants, l’avenir sera sans doute plus radical. On voit mal comment un conseil d’administration qui a tant freiné les perspectives de rapprochement, et longtemps refusé toute négociation, pourrait demain conserver des postes de direction dans la nouvelle entité. Ils sont clairement les perdants de cette histoire. Retraite dorée néanmoins, que l’on ne s’inquiète pas pour eux !

Supprimer des postes pour créer de la valeur

Oracle va devoir donc absorber Peoplesoft, harmoniser les produits, les gammes et les équipes. Du point de vue financier, Larry Ellison a d’ors et déjà annoncé que dès cette fin d’année, la fusion des deux entreprises serait porteuses de valeur ajoutée pour l’actionnaire, et que cette valeur serait amplifiée en 2005 et 2006. Le sous-entendu est clair, des réductions de charge sont attendues, et donc certainement des suppressions de postes. Comme dans chaque fusion, les équipes de support (marketing, administration, support client…) seront les premières sollicitées. Mais les équipes commerciales pourraient bien être également réorganisées et optimisées à la faveur de l’harmonisation des offres.

Autre question que tout le monde se pose, « who’s next ? »

Depuis l’annonce du rachat de JDEdwards par Peoplesoft, suivi de l’OPA de Oracle sur ce dernier, l’ensemble des analystes prédit une concentration active du marché des progiciels de gestion. La révélation des tentatives de rapprochement entre SAP et Microsoft a continué d’alimenter la rumeur. Dans l’hexagone, le rapproche de CCMX et de Cegid, les rachats de Adonix sur le marché… vont dans le même sens. ERP, décisionnel et CRM seront les prochains théâtres d’opération des banques d’affaires et conseils spécialisés. A suivre dans les prochains mois… ou les prochains jours car nous avons appris à être surpris !



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