Kxen, condamné en appel, risque de perdre ses brevets !

Article légèrement modifié par rapport à sa version originale pour tenir compte de points juridiques importants.


Rédigé par le 19 Juin 2006

Quelles conséquences pour les clients, les partenaires et l’entreprise ?



Le 19 mai, la Cour d’Appel de Paris a rendu un arrêt dans une affaire qui oppose depuis plusieurs années l’éditeur Kxen à la société Sofresud. Il s’agit d’une question de brevets concernant un système de modélisation et de prédiction, qui serait à l’origine du conflit entre les deux sociétés.
Ayant initialement travaillé ensemble, au début des années 90, les deux sociétés ont finalement choisi de mettre fin à leurs relations et signé un protocole d’accord en ce sens, en 1997. Chacune dépose alors un brevet concernant ses procédés de data mining. Sofresud reproche à Kxen d’avoir copier son invention, et porte l’affaire devant les tribunaux. En 2002 Sofresud est déboutée par le Tribunal de Grande Instance de Paris, mais la société fait appel.
La Cour d’Appel de Paris vient de casser le jugement de 2002 et de donner finalement raison à Sofresud. Comme l’explique sur son blog Pierre Breese, juriste spécialisé dans la propriété industrielle et de l’innovation, « Sofresud devient cessionnaire des brevets français et étrangers de Kxen déposés abusivement, cette dernière devenant contrefactrice des brevets en question, si elle exploite le système brevetée par elle-même ».

En langage moins juridique, mais plus compréhensible, cela revient à dire que la maison mère de Kxen (située à San Francisco) et toutes ses filiales, ne pourraient plus commercialiser de logiciel s’appuyant sur les brevets litigieux, sous peine d’astreinte, et de dommages-intérêts potentiels que pourraient réclamer Sofresud.

Bien entendu Roger Haddad, fondateur de Kxen n’est pas de cet avis. Il vient d’ailleurs de publier un communiqué précisant la position de l’entreprise :
« Comme tout société ayant une activité importante dans la recherche et le développement de logiciels, KXEN dépose des demandes de brevet dont certaines peuvent faire l’objet d’un débat judiciaire.
La décision de la Cour d’Appel de Paris du 19 mai 2006 a confirmé un point essentiel : les droits exclusifs de KXEN sur l’invention dite du « critère de convergence » (objet de la revendication 21 de sa demande de brevet PCT EP 00/10114). Il s’agit d’un apport majeur de KXEN aux logiciels de régressions régularisées locales, dont les premiers ont été développés au début des années 1990, à l’initiative notamment de la société Neuristique. Nous avons d'ailleurs acquis les droits de cette société dans le cadre d'un contrat de cession.
S’agissant du reste des revendications du brevet en cause, nous contestons formellement l'analyse des juges qui n'ont manifestement pas disposé de toutes les informations. Nous donnons instruction à notre avocat de former un pourvoi en cassation afin notamment que soient respectés les éléments du domaine public de la théorie statistique de l’apprentissage (à savoir la régularisation statistique locale) concernés par ce litige et que les droits des mathématiciens et chercheurs à l’origine de ces logiciels soient préservés.
En tout état de cause, cette décision ne remet pas en cause les droits d’auteur de KXEN sur ses logiciels ».


Un pourvoi en cassation qui devrait en tous cas remettre à plusieurs années la conclusion de cette affaire. Pierre Breese nous précise que le "pourvoi en cassation en matière civile n'est PAS SUSPENSIF (article 579 NCPC)".
Le jugement pourrait donc être exécuté rapidement.

Sur le moyen terme, malgré l’optimisme des dirigeants de Kxen, certains clients ou partenaires pourraient être tentés de prendre un peu de recul. En France mais surtout aux Etats-Unis, les grandes sociétés utilisatrices ou revendeurs/partenaires de Kxen ne voudraient pas voir leur nom mêlé à une affaire de contrefaçon de brevets. Teradata, Business Objects, Acenture, Experian, HP, IBM… tous mis en avant par Kxen sur son site web, pourraient se poser des questions.
Mais il reste à Kxen sans doute plusieurs années avant qu’un jugement définitif ne soit rendu, cela laisse également suffisamment de temps à l’éditeur pour développer de nouveaux algorithmes et supprimer du code source de ses produits les éléments litigieux. A très court terme, il n’y a sans doute aucun risque juridique pour les clients actuels.



Dans la même rubrique :